L'IA bouscule les prestations intellectuelles
- timotheedulud
- 14 sept.
- 3 min de lecture
L’intelligence artificielle ne se limite plus aux robots ou aux algorithmes dissimulés dans les moteurs de recherche. Depuis l’émergence des modèles dits « génératifs », comme ChatGPT, elle s’invite au cœur même des prestations intellectuelles : ces services à haute valeur ajoutée fournis par des architectes, avocats ou communicants.

L’adoption de l’IA est en forte croissance dans les entreprises françaises, avec plus d’un quart des sociétés l’utilisant régulièrement et une augmentation annuelle de 35 %. Longtemps préservés par la complexité de leur savoir-faire, les métiers intellectuels voient aujourd’hui leur fonctionnement, leur modèle économique et même leur légitimité profondément remis en question par l’usage croissant de l’intelligence artificielle.
La première onde de choc est celle de la productivité. L’IA générative permet de produire en quelques secondes des notes de synthèse, des projets de contrat, des pitchs commerciaux ou des analyses de marché. Dans les cabinets de conseil, on ne cache plus l’usage massif de ces outils pour accélérer la phase de cadrage, générer des trames ou simuler des scénarios. Idem dans les agences de communication, où les rédacteurs publicitaires collaborent désormais avec l’IA pour produire plus de contenu en moins de temps.
Même les cabinets d’avocats s’y mettent : certains utilisent des IA spécialisées pour générer des actes simples, résumer des décisions de justice ou identifier des jurisprudences pertinentes. « On ne remplace pas l’expertise juridique, mais on automatise tout ce qui est fastidieux », explique un associé d’un grand cabinet parisien.
L’enjeu de la qualité
Alors que les projets urbains se multiplient sous la pression démographique et environnementale, les agences d’architecture adoptent de plus en plus d’outils d’IA pour générer des esquisses, tester des scénarios ou optimiser l’usage des matériaux, permettant de fait d’explorer des solutions plus durables.
« L’IA ne remplace pas la sensibilité humaine », précise toutefois l’architecte Silvio d’Ascia, qui a mis en place une cellule dédiée au sein de son agence parisienne il y a environ un an. « L’usage de l’IA nous permet surtout de mieux analyser l’impact et l’insertion des projets dans leur contexte. Les maîtres d’ouvrage, publics et privés, peuvent exiger un certain niveau de qualité de représentation du projet afin d’être sûrs de son impact. Dans de nombreux concours et appels d’offres, cette mesure de l’impact esthétique, volumétrique et environnemental est nécessaire. »
Simulations, balades virtuelles... autant de possibilités qui permettent d’accélérer et d’éclairer la prise de décision préalable à la réalisation. « Je continue toujours de dessiner à la main, de faire de jolis croquis. Cela fait partie de mon bagage et de mon plaisir au quotidien ! Ce bagage est désormais amplifié, en jonglant entre croquis et image d’insertion photoréaliste à travers l’IA, sans même devoir passer par le dessin informatique, en faisant des variantes avant d’entamer le véritable projet en CAD-Revit », explique l’éminent architecte.
La clé du succès résiderait dans le niveau de compétences. « Si vous n’êtes pas sachant, l’IA peut être très dangereuse, alerte Silvio d’Ascia. Une expertise est nécessaire afin de ne pas avoir de résultats néfastes. Il faut toujours une interface humaine ! Et donc le spectre de compétences qu’un architecte doit avoir s’élargit de plus en plus ! »
Le défi : former des professionnels tout en garantissant que l’IA reste au service du projet et de ses usagers. Cela suppose donc d’introduire l’IA dans les écoles et de former non seulement à la technique propre du métier d’architecte, mais aussi au « métalangage » lié aux nouveaux outils (programmation, script...) pour un usage optimal de l’IA dans le process.
« Il faut avoir confiance dans l’évolution technologique de notre métier, mais sans jamais oublier qui tient le crayon ! » conclut Silvio d’Ascia.
Un nouvel âge des métiers de l’esprit s’ouvre donc, plus technologique, mais pas moins humain.

















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