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IL FAUT EMBARQUER DAVANTAGE LES HABITANTS DANS LA CONSTRUCTION DU GRAND PARIS !

Chloé Morin et Marie Le Vern, co-fondatrices de Societing*, souli­gnent les avancées, les poten­t­iels mais aussi les ratés d’une construction du Grand Paris à laquelle elles suggèrent d’associer davantage les citoyens, habitants, usagers. En utilisant le puissant moteur de la transition écologique.




Quelle est votre vision de la construction du Grand Paris ?

Marie Le Vern : Le Grand Paris des habitants, des entreprises, des associations, le Grand Paris du quotidien existe depuis bien longtemps ! Comme trop souvent, l’institutionnel a été et est encore à la traîne de la réalité vécue et de la vie quotidienne dans nos villes et nos quartiers. Mais nom­bre d’acteurs publics et privés ont mis et mettent beaucoup d’énergie pour rattraper ce retard, institutionnel, notamment. Ce n’est pas évident car les structures locales, les modes d’élections ne facilitent pas les bonnes volontés et quelques fois les compétences ne sont pas exercées à la bonne échelle.


Chloé Morin : L’émergence de la métropole et des territoires a été utile, ce sont des périmètres cohérents. Nous devons nous réjouir aussi des avancées majeures que constituent les développements et mises en service prochaines des différentes lignes de transport du quotidien (nouvelles lignes de métro, extensions et nouvelles lignes de tramway, entre autres) qui déjà reconfigurent les villes et changent la donne en particulier sur la question du logement. Nous pouvons espérer beaucoup des Jeux olympiques et paralym­piques, même s’il faut qu’ils soient plus grands-parisiens que seulement parisiens. Toutefois, ne croyons pas que tout va aller spontanément et on peut regretter que les réflexions qui animent les chercheurs, les chefs d’entreprise, les différentes associations et surtout les avis des millions de Grands Parisiens n’irriguent pas autant qu’il le faudrait le débat public et les décisions politiques, à tous les niveaux.


De quelle manière percevez-vous l’évolution des attentes, des aspirations ou des exigences des Grands Parisiens dans ces domaines ?

CM : Elles oscillent entre la fierté, l’énergie et une déception qui peut confiner à la lassitude. Habiter, vivre dans le Grand Paris, c’est vivre dans un des espaces les plus denses au monde, les plus touristiques, parmi les plus attractifs et qui offre des opportunités comme peu de territoires peuvent en promettre. Les habitants ont conscience de cela, ils ne sont pas dans une bulle et il suffit de se promener dans la rue, de faire la queue devant un musée ou encore de réserver un restaurant pour comprendre que le monde entier se donne rendez-vous ici.


MLV : D’un autre côté, les différences de niveau de vie, des fractures sociales qui se sont muées en gouffres infranchissables, un quotidien souvent dur, parfois violent, épuisent certaines des meilleures volontés et sont autant de freins à l’harmonie et au développement collectif et individuel. Les aspirations des Grands Parisiens sont connues : ils veulent pouvoir accéder sans entrave d’aucune sorte à tout le Grand Paris.


Comment les acteurs publics et privés peuvent-ils travailler ensemble pour répondre aux attentes des Grands Parisiens ?

CM : Il n’y a pas de modèle unique et il y a déjà beaucoup d’espaces où ce dialogue existe : les collectivités, les établissements publics, les syndicats de tous ordres s’efforcent de faire vivre ce dialogue. Ce lien vit aussi à travers les services publics et la commande publique sous toutes ses formes. Mais pour autant, on doit impérativement faire mieux, à tous les points de vue. Un des moteurs les plus puissants pour aller plus loin et faire en sorte que les changements, notamment sur l’adaptation au bouleversement climatique, surviennent, c’est d’embarquer les citoyens, les habitants, les usagers, celles et ceux qui vivent et font vivre le Grand Paris. Ce sont eux qui en ont l’expérience la plus pointue. Pour cela, il faut conforter les cadres qui existent et pousser les acteurs à prendre des risques qui, en réalité, n’en sont pas.


MLV : En effet, au moment de porter un projet à l’échelle d’un territoire (mutation d’un espace urbain, construction de logements, installation d’une nouvelle activité, etc.), les élus et les porteurs de projet se posent souvent des questions pour savoir comment éviter les oppositions, voire les recours. Notre conviction, mais surtout notre expérience, c’est qu’il faut au contraire recueillir, solliciter, aller chercher largement l’opinion publique locale pour qu’elle s’empare du projet, qu’elle le coproduise. Ça ne règle évidemment pas tout, mais concernant les projets que nous accompagnons, à chaque fois que nous avons agi ainsi, ils ont plus vite abouti, ont été moins contestés et sont systématiquement meilleurs, en ce sens qu’ils remplissent mieux les objectifs que voulaient leur assigner la puissance publique et les acteurs privés ou associatifs.



* Societing, cabinet de conseil en stratégie d’influence et analyse d’opinion, créé en 2020, accompagne les entreprises et les décideurs.


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