En février dernier, la première ministre Élisabeth Borne a annoncé la mobilisation de la Société du Grand Paris pour participer à la réalisation de nouveaux services de transport métropolitains. Une proposition de loi est venue depuis préciser son rôle et la renommer Société des Grands Projets.
La Société du Grand Paris (SGP) devra, aux côtés de la SNCF, « mettre ses compétences au service des régions et entamera, dès le mois de mars, des discussions avec les exécutifs locaux concernés pour déterminer le calendrier, les modalités opérationnelles et de financement pour les nouveaux projets de RER métropolitains », a indiqué Élisabeth Borne en février 2023. « Cette annonce inaugure une nouvelle méthode reposant sur la complémentarité de la maîtrise d’ouvrage de la SGP avec celle de SNCF Réseau », a réagi l’établissement public. « Alliant ambition environnementale, concertation, savoir-faire technique et stratégie de financement de long terme, elle permettra à de nouveaux projets de bénéficier d’une filière d’ingénierie d’excellence constituée par la puissance publique. » La SGP précisait toutefois que « le Grand Paris Express reste sa mission première ».
Une idée pas totalement nouvelle, puisque l’institution a déjà créé une filiale, SGP Dev, afin de valoriser son savoir-faire pour d’autres projets que le Grand Paris Express. Une mission qui se traduit par la mobilisation de son expertise sur le développement du réseau express autour de Lille.
« La loi du Grand Paris prévoit la disparition de la SGP au terme du projet, mais l’accumulation d’expériences mérite probablement d’être valorisée au service du pays et de ses territoires », observait en mars dernier, lors d’une audition à l’Assemblée nationale, Jean-François Monteils, président du directoire de la SGP, qui considère que la mise en œuvre progressive du nouveau métro francilien pourrait permettre de dégager de la disponibilité pour d’autres opérations.
Une proposition de loi pour étendre les missions
Plusieurs députés Renaissance ont initié une proposition de loi qui vise à préciser l’ambition, annoncée par Élisabeth Borne, de mettre « en place les outils nécessaires pour permettre l’accélération des projets et la réalisation rapide » des services express régionaux métropolitains. Le texte étend notamment les missions de l’actuelle Société du Grand Paris afin qu’elle puisse contribuerau déploiement du programme prévu et, le cas échéant, intervenir sur d’autres opérations de transport collectif à la demande de l’État ou des collectivités. Il adapte la « règle d’or » de l’établissement public et modifie le code des transports pour prévoir l’organisation par convention des relations entre SNCF Réseau et la SGP, rebaptisée Société des Grands Projets. Cette dernière aura deux champs d’intervention : les infrastructures nouvelles du réseau ferré national et les lignes qui ne sont pas ouvertes à la circulation de voyageurs ou de fret depuis cinq années ; les projets de création ou d’extension d’infrastructures de transport public urbain ou périurbain de personnes.
« Nous passons d’une culture d’opposition à une culture de coopération », a fait valoir le ministre des transports Clément Beaune, en juin, lors de la discussion à l’Assemblée nationale. « Nous aurons évidemment besoin du groupe SNCF, au premier chef de SNCF Réseau, mais cet acteur historique devra coopérer avec d’autres plus récents, en particulier avec la Société du Grand Paris […] pour que son expertise acquise en Île-de-France serve l’ensemble du territoire », a-t-il conclu.
Quelles liaisons suburbaines autour des grandes agglomérations de province ?
Par Thierry Dallard
L’ambition du gouvernement en faveur du développement d’une offre de transport collectif décarbonée est une excellente chose car elle traduit une volonté d’engager, au sein des métropoles de province, une politique nationale que l’on n’avait connue jusqu’ici qu’en Île-de-France avec le développement des RER mais surtout, en 2010, avec la création du Grand Paris Express (GPE), le « métro des banlieues », d’une longueur de 200 km, identique au métro historique parisien.
Le terme de « RER métropolitain » n’est cependant pas le terme le plus heureux pour illustrer cette ambition car, au-delà de l’image pas vraiment positive que les habitants de province peuvent avoir du RER francilien, le concept renvoie à un service ferroviaire, en étoile, dont on a pu mesurer les fragilités.
« Ferroviaire », il doit en général cohabiter avec un ensemble d’autres services comme le transport des marchandises (NB : l’ambition est de doubler la part du fret) ou le transport longue distance, rendant souvent les marges de manœuvre difficiles. Créer une offre de 4 ou 5 trains par heure, toute la journée, sera indiscutablement un énorme progrès pour de nombreux territoires actuellement mal desservis, mais cela sera difficile et ne créera pas un « choc de mobilité », comme avec un réseau dédié, indépendant du réseau ferroviaire (un métro ou un tramway) où les dessertes plus fréquentes peuvent se faire toutes les deux minutes. Or seul un tel choc, en fréquence et en densité de desserte, peut avoir un gros impact sur la structuration urbaine d’une métropole. Car un projet de transport n’est pas seulement un outil de mobilité, mais est aussi un formidable levier pour mettre en œuvre la politique du Zéro artificialisation net. Les études du GPE ont ainsi montré que 50 % des avantages socio-économiques se trouvaient dans ces effets urbains de densification autour des multiples stations du métro. Espérons donc que l’ambition exprimée en faveur des métropoles de province ne s’arrêtera pas au seul réseau ferroviaire.
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